Pierre |
La vie d’un traileur n’est pas toujours très simple. Cela demande des sacrifices, et ce dans tous les domaines, que ce soit dans le domaine culinaire, financier et même social. Une course, aussi bien trail découverte, trail classique ou ultra-trail ne demandera pas les mêmes sacrifices selon notre niveau, nos objectifs, notre motivation et bien d’autres choses, mais chacune a des exigences et nécessite un minimum de préparation. Mais pourquoi s’infliger cela alors ? Pourquoi se « faire du mal » pour ce que beaucoup pensent être une simple course ?
Pierre |
D’un simple défi personnel à une revanche sur la vie, en passant par une (re)prise en main de sa santé, nombreuses sont les raisons qui nous poussent à nous inscrire à des courses, et TOUTES sont respectables. Certains jouent le podium, le chrono, la performance, tandis que d’autres ne pensent qu’à franchir la ligne d’arrivée, prendre du plaisir, faire des rencontres.
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Tout se passe généralement en quelques clics de souris. Recherches Google, avis de la communauté des traileurs, site officiel de la course et des dizaines de vidéos Youtube plus tard : « Inscription », « finaliser commande », « payer » et vous vous retrouvez inscrit pour un trail à l’autre bout de la France (à défaut de pouvoir aller à l’autre bout du monde). Sur le moment, c’est l’euphorie, la joie et l’envie qui se manifestent. Puis il faut se rendre à l’évidence, il faut s’entraîner. Un petit programme jusqu’au jour J, plus ou moins fourni, plus ou moins sérieux, plus ou moins respecté, c’est vrai, mais un programme tout de même. Lors de chaque sortie, les images des vidéos de THE course visionnée des dizaines et des dizaines de fois remontent en tête ; on s’y croirait presque… Les jours passent… Pour certains, l’objectif 0 alcool pendant la préparation est difficile à tenir… Pour d’autres, c’est plutôt les sucreries (dans mon cas par exemple… Hmmm… Vive la gourmandise…), et enfin, pour certain(e)s, l’abstinence devient pesante… Au fait ? Pour ou contre l’abstinence avant une course ? Non, bref, je m’égare… Les semaines passent, puis les mois… On en vient à se demander qui de nous ou de notre entourage souffre le plus de cette préparation. La course approche à grand pas, la pression monte et la peur pointe le bout de son nez. L’avantage, c’est que ce n’est pas la peine de se prendre la tête sur les menus de la semaine. Pâtes, riz, pâtes, pâtes, riz… Les derniers jours avant la courses, les jambes frétillent, l’envie d’aller courir, que dis-je, le besoin d’aller courir se fait sentir, mais il faut que tu résistes, prouves que tu existes (pardon), et être raisonnable. A chacun ses petites mimiques la veille d’une course. Personnellement et comme beaucoup d’autre, je prépare toutes mes affaires sur mon lit, pour être certain de ne rien oublier, du caleçon fétiche aux fraises Tagada. La première bataille commence alors : accrocher le dossard. Dans un premier temps, il ne faut pas se piquer les doigts. Dans un second, il faut que celui-ci soit droit ! Non mais vous vous voyez vous sur les photos de la course avec un dossard de traviole ? I-N-I-M-A-G-I-N-A-B-L-E ! On s’efforce de vouloir se coucher tôt tout en sachant pertinemment que l’on ne dormira pas plus tôt du tout, avec cette petite boule au ventre. On ne dirait pas comme ça, mais même après 35 courses de 10 à 65 km, la boule au ventre est encore là…
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THE D-DAY !!! Réveil comme un petit fou, après une nuit mitigée. La tête est déjà partie, les jambes sont prêtes à souffrir, mais le petit-déjeuner lui ne se fait pas tout seul. Une fois encore, chacun voit 3h00 à sa porte… Ben oui, pour un départ à 5h30/6h, réveil au minimum à 3h00… Le stress monte, moooonte, mooooooooooooooonte, et PAN, le départ est lancé. D’un coup, d’un seul, toute la peur, le stress, l’anxiété disparaissent et on part avec des centaines de copains que l’on n’a jamais vus auparavant, et qui comme nous, mettent aujourd’hui un terme à quelques sacrifices, tout en apothéose. Pendant la course, on se met à penser à des choses auxquelles on n’aurait jamais imaginé penser un jour… « Tiens c’est quand même bien foutu un arbre », « ça a quel goût les feuilles de chêne ? », « et zut, j’ai envie de… » Vous l’aurez compris, on pense à tout et en même temps à rien. On se regarde tous, on bave sur le sac du voisin, on envie les mollets de celui de devant, on encourage celui en difficulté, on se fait encourager quand on est soi-même en difficulté. Les kilomètres passent, tout va bien. Aux ravitaillements on prend certes le temps de s’alimenter, de s’hydrater, mais surtout d’échanger avec les bénévoles, eux qui sont parfois levés bien avant nous, qui pour certains aimeraient être des nôtres mais qui ont fait le choix de se sacrifier pour que nous passions un merveilleux moment… C’est ça le trail : du partage ! Car sans eux, nous ne serions pas là … nous serions encore au lit… un liiiiiiiit… on a déjà oublié ce que c’était que de s’allonger. Voici alors LE moment difficile. Les jambes lourdes, l’estomac en vrac, une côte à 35% sur une durée indéterminé… on regarde le profil de la course imprimé sur le dossard, et… oh… mais… elle n’était pas annoncée cette bosse-là ! Nous aurait-on menti ? On prend sur nous, on continue. On se fait doubler de tous les côtés, on se décourage, puis on regarde la couleur des dossards et… Soulagement… Ils sont sur la distance inférieure. Ils ne se sont levés qu’à 5 heures eux ! Autrement dit la grasse matinée ! On se dit que « plus jamais… » Non mais c’est vrai quoi, faut être con ! Puis arrive un nouveau ravitaillement. Nouveaux sourires, nouvelle banane, un TUC et ça repart (on trouve rarement de Mars aux ravitaillements). Il reste 10 km, on n’a jamais été aussi proche. Etrangement, les jambes reviennent, et ces 10 derniers kilomètres, je ne vais pas dire qu’ils passent crème, mais presque. L’objectif touche au but, mais il faut rester lucide. On n'est pas à l’abri d’un accident même a quelques centaines de mètres de l’arrivée. Le public se fait de plus en plus dense, et il scande notre nom !!! Allez, Allez, encore 400 mètres !!! Non, nous ne sommes pas populaires, connus et reconnus… Notre nom est simplement écrit sur le dossard. Puis la ligne d’arrivée avec son arche majestueuse se montre enfin. De nombreux sacrifices, de nombreux doutes, de nombreuses craintes s’effacent aussitôt la ligne d’arrivée franchie et laissent place à la plus totale euphorie.
Pierre |
On se serre dans les bras l’un de l’autre, on s’embrasse, on se félicite et on est félicité par des gens venus encourager un autre concurrent. On est fatigué. Fatigué mais heureux, avec un sourire qui en dit long. « Plus jamais » mais à l’année prochaine !!! Parce que oui, à peine terminée, on pense à la prochaine. Il n’y a maintenant plus que deux choses qui nous hantent l’esprit. Aller dormir, parce que mine de rien on est levé depuis 3h00 du mat’ NOUS, et raconter à qui voudra l’entendre, et même à qui s’en fout royalement le résumé de notre course, car oui, on en est super fier !!!! Sans doute que nous sommes chiants avec nos comptes rendus à rallonge. Sans doute que lorsque l’on commence notre récit vous lâchez intérieurement un soupir de désespoir, et que lorsque nous finissons, vous lâchez un soupir de soulagement. Sans doute que vous vous sentez un peu délaissés lors de ces moments. Mais n’oubliez jamais que c’est en partie grâce à vous que nous sommes parvenus à aller jusqu’au bout… On ne vous le dira jamais comme ça, mais dans les moments difficiles on pense à vous tous.
Pierre |
Alors à ceux qui dans l’incompréhension la plus totale nous posent sans cesse des questions. Nous ne vous demandons pas de comprendre… vous ne pourriez pas… Simplement respecter nous. Respectez notre sport. Respectez notre passion. Et quand bien même vous voudriez réellement comprendre, trouvez chaussure à votre pied, prenez une bonne dose de motivation, ouvrez grand les yeux, et nous nous ferons un plaisir de vous emmener à l’aventure sur les sentiers. A votre rythme bien-sûr. Mais c’est quand vous voulez.
Pierre |
Un grand merci à Pierre qui a accepté le partage de se texte sur mon blog pour vous éclairer sur la vie d'un traileur.
Vous pouvez retrouver Pierre sur sa page Facebook "Un caillou qui court" : https://www.facebook.com/UnCaillouQuiCourt/
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