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Toujours en quête de vous aider dans le monde difficile de l'immobilier, je vous propose un nouvel
article d’actualité juridique en droit immobilier rédigé par Maître Jérôme DOULET au sujet
d’une décision rendue par la Cour de Cassation.
Celle-ci statue sur l’étendue de la mission de l’agent immobilier dans la
mise en œuvre de la faculté de rétractation de l’acquéreur non
professionnel d’un bien immobilier.
L’ÉTENDUE DE LA MISSION DE L’AGENT IMMOBILIER
DANS LA MISE EN ŒUVRE DE LA FACULTÉ DE RÉTRACTATION DE L’ACQUÉREUR
NON PROFESSIONNEL D’UN BIEN IMMOBILIER
Par Maître Jérôme DOULET, Avocat, SCP AKPR
Par un arrêt rendu le 21 mars 2019, la Cour de Cassation précise l’étendue de la mission de l’agent immobilier dans la mise en œuvre de la faculté de rétractation de l’acquéreur non professionnel d’un bien immobilier.
Les faits de l’espèce sont les suivants :
Monsieur et Madame X. ont conclu, par l’entremise d’un agent immobilier qu’ils avaient mandaté, un compromis de vente portant sur leur appartement au profit de Monsieur et Madame Y.
Afin de faire courir le délai de rétractation prévu par l’article L.271-1 du Code de la Construction et de l'Habitation, l’agent immobilier a notifié le compromis à Monsieur Y. d’une part, et à Madame Y. d’autre part, selon lettres recommandées distinctes toutes deux réceptionnées.
Les époux Y n’ont pas usé de leur faculté de rétractation.
Ils ont néanmoins refusé de signer chez le Notaire l’acte définitif de vente, de sorte que Monsieur et Madame X. ont saisi le Tribunal aux fins d’obtenir à leur profit le paiement notamment de la clause pénale stipulée au compromis.
En défense, les époux Y. ont soutenu que le compromis était nul au motif que la purge du délai de rétractation de Madame Y. n’était pas valable dans la mesure où les accusés de réception des deux lettres recommandées avaient été signés par son époux.
Monsieur et Madame X. mettaient en cause l’agent immobilier.
Par jugement rendu le 18 décembre 2015, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a considéré que la présence à la signature de Monsieur Y. sur l’accusé de réception du courrier destiné à Madame Y., a pu légitimement faire croire à l’agent immobilier et aux époux X. qui, sur ce point, pouvaient légitimement se fier aux diligences de la Poste, que Monsieur Y. était habilité par son épouse à retirer son courrier.
Le Tribunal en a déduit que la notification faite à Monsieur Y. vaut donc à l’égard de son épouse en vertu du mandat apparent de ce dernier, et que les époux Y. étaient donc forclos à se rétracter.
Les époux Y. ont fait appel de cette décision.
Par arrêt du 27 octobre 2017, la Cour d'appel de PARIS a infirmé le jugement.
La Cour a estimé qu’il ne pouvait être tenu pour certain que le compromis ait été notifié à Madame Y., à supposer même que Monsieur Y. ait pu être considéré par la Poste comme investi d’un mandat apparent de son épouse.
La Cour d’appel a conclu que le délai de rétractation n’avait pas couru et a annulé le compromis de vente.
En revanche, la Cour d’appel n’a pas retenu la responsabilité de l'Agent immobilier en considérant que celui-ci avait rempli sa mission, laquelle n’incluait pas la vérification des signatures apposées sur les avis de réception de la notification du compromis.
Les époux X. ont formé un pourvoi devant la Cour de Cassation.
Celle-ci casse et annule l’arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 27 octobre 2017, en considérant « qu’il incombait à l’agent immobilier de vérifier la sincérité, au moins apparente, de la signature figurant sur l’avis de réception de la lettre recommandée adressée aux acquéreurs ».
La Cour de Cassation opère ainsi un revirement de jurisprudence par rapport à sa précédente décision du 10 mars 2016 aux termes de laquelle elle avait rejeté un pourvoi exercé contre un arrêt d’une Cour d’appel qui avait considéré que la mission de l’agent immobilier ne s’étendait pas à la vérification des signatures des accusés de réception.
Il est vrai que ce précédent arrêt était inédit et isolé. La Cour de Cassation entend en revanche donner une large publicité à la solution qu’elle a dégagée aux termes de son arrêt rendu le 21 mars 2019.
Arrêt de la Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 21 mars 2019, n°333